Les Occidentaux ont-ils peur d’un remake du scénario malien bientôt au Burkina ? Il semblerait que oui.
Actualité en Afrique :
Mali : la brève interpellation de deux membres de l’ambassade de France illustre le climat de tension entre Bamako et Paris
Niger : 7 membres de Boko Haram tués dans le sud-est du pays
les exportations du Zimbabwe vers la Chine continuent d’augmenter
Kenya : 543 944 tonnes de marchandises convoyées via le réseau ferroviaire à écartement standard en juillet 2022
Analyses de la rédaction :
Mali : Barkhane désarmé
Pourquoi un ex-général malien appellerait-il la population à quitter les zones où l’EIGS et le GSIM cherchent à étendre leur influence à savoir la région stratégique de Talataye qui a été prise par les terroristes il y a quelques jours ?
« Il n’y a pas de forces armées ni aucun entité pour y garantir la sécurité des populations », a dit le général Gamou.
« Les ennemis prendront sûrement le contrôle de ces régions, car aucune sécurité n’est là pour les en empêcher », a insisté le général Gamou, en citant notamment le village de Djebock, situé entre Gao et Talataye. Aussi a-t-il exhorté les civils à « s’installer dans les grandes villes pour leur sécurité et celle de leurs troupeaux en attendant le retour de la stabilité ».
Ce général semble donner du grain à moudre aux terroristes, puisque l’exode de la population dans ces régions signifie un déploiement plus facile et plus massif des forces interventionnistes et un terrain aplani à davantage opérations militaires, pillages, etc. Cet appel à quitter les zones stratégiques lancé par ce général prouve d’autant plus que cette montée en puissance des forces aériennes maliennes boostée par une alliance avec l’Algérie et la Russie, a semé la panique au sein de l’axe US-OTAN d’où cette tentative de se débarrasser de la présence humaine de cette région pour mieux y concocter les complots.
De plus, cette alliance et concordance entre les Touaregs, Peuls et les forces armées dans tout le pays et l’échec cuisant du projet de démembrement du Mali est une raison de plus à ce genre de communiqué, mais également aux tentatives de déstabilisation via l’ambassade de France au Mali, des tentatives qui ont été étouffées dans l’œuf.
En effet, deux militaires de l’ambassade de France, en poste dans la capitale malienne et bénéficiant d’une protection diplomatique, ont été interpellés jeudi, avant d’être relâchés vendredi en fin de matinée. Bien que selon les médias occidentaux ces deux personnes étaient juste en train de photographier « censé servir de point de rassemblement pour les ressortissants français en cas d’évacuation forcée », il semblerait que les agents d’un pays qui, selon Mali est complice des terroristes et ce, en leur fournissant des informations, ne peuvent être fiable et tout agissement de telle sorte sera effectivement repéré par le gouvernement malien.
« Ces deux agents de liaison travaillant auprès de l’attaché de défense de l’ambassade, notamment chargés de veiller à la sécurité des Français installés à Bamako, étaient partis, jeudi, effectuer “une mission d’évaluation du risque sécuritaire” dans le centre-ville de la capitale. Arrivés à proximité d’une école privée accueillant de nombreux enfants d’expatriés français, les deux militaires ont pris des photos d’un terrain vague, censé servir de point de rassemblement pour les ressortissants français en cas d’évacuation forcée. “Pendant qu’ils le photographiaient, un attroupement de jeunes s’est formé autour d’eux. Des soldats maliens étaient à proximité. Comme une de leurs bases militaires se trouve à côté, ces derniers les ont arrêtés, pensant qu’ils étaient en train d’espionner leur camp. Il y a eu confusion. Après vérification de leurs téléphones, ils ont été relâchés. Il s’agit d’un simple malentendu”, avance une source diplomatique française », lit-on sur RFI à ce sujet.
Le Mali n’est pas prêt à se laisser faire et c’est en exigeant l’extradition des membres de l’ancien gouvernement du pays par la Côte d’Ivoire que le Mali compte avancer son procès contre la France avec de nouveaux témoins. Pendant ce temps, le Mali reste attentif et observateur de tout acte venant de l’axe US-OTAN et ne leur permettra aucun pas de travers !
Burkina : bientôt le remake du scénario malien ?
Pourquoi les médias mainstream soutiennent-ils l’idée de la refondation de l’armée burkinabée « pour faire face au risque terroriste » ?
C’est en tout cas ce qui en ressort des articles publiés ce 18 septembre par RFI et cie, des articles dans lesquels, on fait état de l’appel lancé par le Front patriotique, un regroupement d’une trentaine d’organisations de la société civile et de partis politiques, à la junte militaire au pouvoir au Burkina Faso.
« La gestion politicienne de la crise terroriste, faite de mensonge d’État, de manipulation, d’affairisme et de corruption, se caractérise par une absence de stratégie politique. Le Front patriotique appelle à la mobilisation et à la responsabilisation de toutes les forces sociales. » Pour ce regroupement de partis politiques et d’organisations de la société civile, il faut une refondation de l’armée burkinabée, car celle-ci est championne des instabilités politiques au sommet de l’État. Le Front patriotique invite toutes les autres organisations à se joindre à lui dans cette lutte pour une libération réelle du Burkina Faso », lit-on sur RFI.
Les Occidentaux ont-ils peur d’un remake du scénario malien bientôt au Burkina ?
Il semblerait qui oui, puisque depuis la visite du président burkinabé au Mali et l’insistance des deux parties sur la création d’une coalition interafricaine antiterroriste, mais également depuis l’entretien du PM du Burkina Faso lors duquel il a remis en cause le partenariat entre Paris et Ouagadougou, la panique est à son apogée dans les cercles occidentaux.
« Il y a des questions à se poser ». C’est en ces termes que le Premier ministre du Burkina Faso, Albert Ouédraogo, a lancé un débat sur le partenariat entre Ouagadougou et son ancienne puissance coloniale, la France. Voilà à peine six mois que le Premier ministre a pris ses fonctions et le moins que l’on puisse dire est qu’il ne mâche pas ses mots.
Lors d’un entretien à la télévision publique du Burkina Faso (RTB), le Premier ministre burkinabé a confirmé qu’un partenariat avec Paris n’était pas forcément gagnant-gagnant. « Je pense qu’effectivement il y a des questions à se poser. On comprend les revendications parce que la France, c’est vrai, c’est le partenaire historique, c’est le premier partenaire, même en termes de chiffres ».
Paraphrasant Thomas Sankara, qui avait indiqué que « l’aide doit servir à assassiner l’aide », Albert Ouédraogo a affirmé que, « si depuis des années, cette coopération n’a pas permis d’assassiner l’aide, il faut se poser des questions ».
Comme au Mali, le peuple burkinabé est en première ligne pour réclamer plus d’équité dans les relations entre Ouagadougou et Paris. On se souvient, fin juillet, que plusieurs dizaines de personnes s’étaient rassemblées dans la capitale du Burkina Faso pour protester contre la présence de la France au Burkina Faso et avaient appelé à une grande mobilisation le 12 août. « En tant que dirigeants, nous ne pouvons pas continuer à rester sourds, à rester insensibles à ces revendications, parce que nous avons des composantes importantes de notre peuple qui le réclament », a affirmé le Premier ministre.
Très peu après ce discours, le président du Burkina a limogé le ministre de la Défense et a annoncé s’être attribué le poste de ministre de la Défense et des Anciens Combattants. Il sera secondé par un ministre délégué en la personne du Colonel-major Silas Kéita.
Depuis que le Mali a quitté le G5 Sahel, cette instance a explosé et un retrait éventuel du Burkina, serait alors un échec et mat final pour l’axe US-OTAN.
Afrique : la souveraineté avant tout !
Après sa rencontre avec Joe Biden, Cyril Ramaphosa a critiqué un texte censé « contrer les activités néfastes de la Russie en Afrique ». Son adoption « donnerait l’impression que l’Afrique est punie parce qu’elle a la Russie pour partenaire », juge-t-il.
Le président américain Joe Biden a reçu le 16 septembre son homologue sud-africain Cyril Ramaphosa pour évoquer le partenariat entre les États-Unis et l’Afrique du Sud.
S’adressant après la rencontre à des journalistes, le président sud-africain a qualifié la rencontre de « très fructueuse et positive », tout en rappelant que son pays ne comptait pas dévier de sa position de neutralité au sujet de la situation en Ukraine.
Il a à ce titre critiqué un projet de loi qui suit actuellement son cours au Congrès américain et qui est destiné à « contrer les activités néfastes de la Russie en Afrique » (« Countering Malign Russian Activities in Africa Act »). Si cette loi était définitivement adoptée, « cela donnerait l’impression que l’Afrique est punie parce qu’elle a la Russie pour partenaire. La majorité des pays africains sont non alignés et nous avons fait savoir qu’il serait injuste de la part des États-Unis de punir [les pays africains entretenant des relations avec Moscou] », a estimé le président sud-africain.
Cette tendance occidentale et à leur tête américaine d’anéantir la dignité africaine et la remplacer par la sous-traitance est une tendance qui ne concerne pas seulement l’Afrique et le dossier Ukraine/Russie, mais on pourrait également le voir dans le cas Mali/Côte d’Ivoire.
La crise actuelle entre Bamako et Abidjan dépasse le cadre strictement régional ouest-africain. Il s’agit en effet et avant tout d’une confrontation entre deux visions diamétralement opposées. L’une misant sur la souveraineté nationale et les valeurs panafricaines, l’autre restant dans une posture de sous-traitance en faveur du néocolonialisme occidental. Et le cadre à proprement dit « régional » prend de plus en plus une tournure continentale.
Depuis l’arrestation, en juillet dernier, de près d’une cinquantaine de mercenaires ivoiriens par les autorités maliennes, la crise ne cesse de s’envenimer entre le Mali et la Côte d’Ivoire. Ceci étant dit, nombreux sont les citoyens ivoiriens qui soutiennent le positionnement du voisin malien dans ce dossier.
Au-delà de l’efficacité à travers laquelle a eu lieu cette arrestation des dits mercenaires, dont l’objectif visait fort vraisemblablement à tenter un énième coup d’État pro-occidental en terre malienne, ou du moins à créer des problèmes sécuritaires pour l’État malien, la fermeté avec laquelle le pouvoir du Mali a maintenu sa ligne jusqu’à maintenant – a été approuvée non seulement par des millions de Maliens, mais également un très grand nombre d’autres citoyens de pays africains.
Pendant ce temps, le président ivoirien et l’un des principaux représentants restants du système néocolonial de la Françafrique tente à nouveau de mobiliser un front anti-malien, notamment au niveau de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Bien qu’il est nécessaire de reconnaître – avec de plus en plus de difficulté, à l’heure où de nombreux chefs d’État de la région, tout comme à l’échelle continentale, sont de plus en plus à l’écoute des aspirations pro-panafricans et pro-multipolaires de leurs citoyens. Avec en prime le rejet des schémas si longtemps entretenus par l’establishment occidental sur le continent.
D’autant plus que les méthodes de déstabilisation, y compris à travers l’implication de mercenaires, sont fort loin d’être nouvelles et représentent aujourd’hui un défi non plus seulement pour les États africains ayant ouvertement coupé le cordon « ombilical » avec l’Occident collectif, mais également tous les pays qui sont en voie de le faire ou du moins qui adoptent un positionnement de plus en plus équilibré, en s’éloignant progressivement du diktat occidental.
Faudrait-il à ce titre rappeler l’implication de mercenaires français, notamment en République centrafricaine dans un passé récent ? Depuis, Paris et d’autres capitales nostalgiques de l’unipolarité tentent par tous les moyens de maintenir cette méthode d’interférence et de déstabilisation à l’encontre des États libres d’Afrique, mais avec une mise à contribution plus active des principaux sous-traitants. Comme celui du gouvernement ivoirien.
De manière générale et dans la crise, qui oppose le Mali au gouvernement ivoirien actuel – la vérité et la dignité semblent prendre le dessus sur le mensonge et les méthodes criminelles. Et cela est connu aussi bien des citoyens maliens qu’ivoiriens, ainsi que d’autres peuples du grand continent africain. La confrontation entre les deux visions prend désormais ouvertement une tournure réellement continentale. Et au vu des processus en cours, aussi bien en Afrique qu’à l’échelle internationale, il devient beaucoup plus facile de comprendre les vives inquiétudes des régimes occidentaux et affiliés.
Avec Mikhail Gamandiy-Egorov, analyste-chroniqueur à l’agence Observateur Continental